Dimanche 15 mars 2015, au centre culturel Eloko ya Makasi, à Masina, dans la ville de Kinshasa, des activistes sénégalais et burkinabés de la société civile en visite à Kinshasa pour des échanges avec leurs camarades congolais ainsi que quatre journalistes ont été arrêtés par une dizaine d’éléments prévôtés militaires des Forces armées de la RDC (FARDC), ont été embarqués de force dans un camion estampillé «FARDC » puis détenus aux cachots de l’Agence nationale des renseignements (ANR). S’agissant des personnes étrangères aux arrêts, sont identifiés Aliou Sané, Fadel Barro et Almamy Sallah, responsables du mouvement sénégalais Y en a marre, révélé pendant la contestation contre la volonté du Président Abdoulaye Wade de se maintenir au pouvoir, par un 3ème mandat, en 2012, et Johann Oscibi, l’un des principaux animateurs du Ballet citoyen, en première ligne lors des manifestations de rue ayant conduit à l’éviction du Président Burkinabé, Blaise Compaoré, fin 2014. «Ces Burkinabés et Sénégalais séjournent depuis 4 jours à Kinshasa, où ils ont eu des réunions avec des jeunes encadrés par une structure dénommée Felimbi, réputée très engagée».
Ces animateurs de la société civile sénégalaise et burkinabé ont été invités du Centre culturel Filimbi (traduisez : sifflet, en lingala, l’une des langues parlées en RDC) à l’Est de Kinshasa et tenu par le sujet français Alain Cannon.
Des dizaines de personnes dont un diplomate et trois journalistes étrangers ont été libérés dans la soirée tandis que le journaliste congolais Eric Izami de la chaîne de télévision Antenne A reste en détention jusque-là, aux côtés des activistes des droits de L’homme sénégalais et burkinabé.
Les deux organisations étrangères dont les responsables demeurent en détention restituaient à la presse les grandes lignes de l’atelier qu’elles avaient organisé et au cours duquel, leurs animateurs expliquaient les profonds changements politiques intervenus dans leurs pays respectifs grâce à l’engagement citoyen.
Halte à la déformation de l’information : une certaine presse affirme malencontreusement que les personnes étrangères arrêtées seraient venues apprendre aux Congolais comment organiser une insurrection populaire. «Les fameux instructeurs seraient arrivés à Kinshasa voici trois jours. Ils ne se doutaient pas qu’ils étaient dans le collimateur des services de sécurité. Hier, dimanche, ils auraient été cueillis alors […] qu’ils étaient en train de dispenser leurs enseignements, à savoir comment défenestrer un pouvoir via des soulèvements populaires. Pas moins», soutient un journal de la place. Un autre journal rapporte que les services de renseignements et la police nationale congolaise (PNC) ont mis la main sur une trentaine de terroristes destructeurs d’origine sénégalaise et burkinabé, dotés d’armes et chargés d’une mission suicide : embraser les institutions de la République. Ce qui présage une opération de sabotage qui mettrait en péril le processus électoral en RD Congo, indique ce canard alarmiste.
Cependant, il est impensable que les préparatifs d’un mouvement terroriste se passent à ciel ouvert, au su et au vu de tout le monde. C’est aussi honteux et confus que le gouvernement RD Congolais, par cet acte s’attribue la mission de cueillir, pour sanction, les tombeurs d’Abdoulaye Wade et du régime Compaoré pendant que ces deux anciens présidents n’ont établi aucune procuration ou un mandat d’arrêt spécial au soin de la justice ou des autorités RD Congolaises.
La police et l’ANR feraient mieux de libérer et laisser ces activistes, respectueux des lois et des droits de l’homme, retourner sains et libres dans leurs pays respectifs.
Il convient de souligner que, plus de 70 ans après, la « gestapo » ne peut renaître, survivre et triompher en RD Congo du moment où l’Afrique ne constitue plus qu’une seule jeunesse éprise de liberté et remontant spectaculairement le degré de sa conscience citoyenne et son éveil démocratique.
Claude Kazadi Lubatshi