Il est possible de voir quels sont les pays qui résolument engagés dans la voie du progrès et quels sont ceux qui se cramponnent dans un statu quo qui condamne les générations actuelles et futures dans une pauvreté intergénérationnelle
Le complexe d’infériorité qui caractérise les états africains engendre le fait que la plupart de nos comparaisons concernant (1) l’état des économies africaines; (2) l’éducation; (3) la gouvernance; (4) le leadership; (5) les industries, etc. Bref, toute la vie dans les pays africains se fait par rapport au monde développé. Ce qui est logique, accepté et acceptable. Étant le fossé grand et presque difficile à rattraper, une autre façon de conduire de telles discussions serait de comparer les pays africains en Afrique subsaharienne entre eux. De cette manière, il est possible de voir quels sont les pays qui résolument engagés dans la voie du progrès et quels sont ceux qui se cramponnent dans un statu quo qui condamne les générations actuelles et futures dans une pauvreté intergénérationnelle.
Sur le plan économique, le Kenya a de loin une meilleure fiche car son PIB par habitant est près de 4 fois plus élevé que le PIB de la RDC. Cela se traduit aussi par un indice de développement humain (IDH) plus élevé au Kenya (0,548) qu’en RDC (0,433) même si les deux pays restent désavantagés sur ce point
Dans cet article, « Cent Tambours Mille Trompettes » focalise son attention sur l’état des universités au Kenya et en République Démocratique du Congo (RDC). Pour y arriver, un bref survol des deux pays sur le plan démographique et économique sera rapidement effectué avant d’aborder la discussion.
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République Démocratique du Congo |
Kenya |
Superficie |
2.345.409 km2 |
581.309 km2 |
Population (en millions) |
73,3 |
44,1 |
Population moins de 15 ans (%) |
46,0 |
41,0 |
Population 65+ |
3,0 |
3,0 |
Population urbaine (%) |
42,0 |
24,0 |
Nombre de naissances pour 1000 habitants |
46 |
31 |
Nombre de décès pour 1000 habitants |
16 |
8 |
Densité au km2 |
33 habitants/km2 |
78 habitants/km2 |
Produit Intérieur Brut par habitatnt |
$ 816 |
$ 3.245 |
Indice de développement humain |
0,433 |
0,548 |
Nombre d’universités publiques |
4 |
23 |
Nombre d’universités privées |
~50 |
20 |
Le tableau ci-haut fait apparaître des ressemblances et dissemblances sur le plan démographique et économique. Sur le plan économique, le Kenya a de loin une meilleure fiche car son PIB par habitant est près de 4 fois plus élevé que le PIB de la RDC. Cela se traduit aussi par un indice de développement humain (IDH) plus élevé au Kenya (0,548) qu’en RDC (0,433) même si les deux pays restent désavantagés sur ce point. Alors que près d’un kenyan sur quatre vit en ville, en RDC près de la moitié de la population vit en ville loin d’une quelconque planification urbaine, reléguant ainsi la majeure partie de cette population urbaine à vivre dans les bidonvilles, sans accès à l’eau potable, aux installations sanitaires qui rencontrent les normes requises, mais aussi sans infrastructures sanitaires et sans écoles dignes d’un État moderne.
Le domaine de l’enseignement supérieur et universitaire en RDC est de loin dominé par le secteur privé contrairement au Kenya. Selon wikipédia, le Kenya aurait un total de 43 universités parmi lesquelles plus de la moitié (soit 23) sont des universités publiques contre 20 universités privées
Sur le plan démographique, les deux pays présentent des structures des populations qui sont jeunes avec, respectivement 46% et 41% des personnes âgées de moins de 15 ans. De même, la proportion des personnes âgées de 65 ans et plus s’élève à 3% dans les deux pays. Ces deux structures par âge posent de sérieux problèmes en termes d’investissements et de développement. En effet, le taux de dépendance par âge (défini comme le rapport de la population inactive—moins de 15 and + 65 ans et plus—divisé par la population active entre 15 et 64 ans) dans ces deux pays s’élèvent respectivement à 96% et 81% en RDC et au Kenya. Ce qui veut dire qu’en RDC, 100 personnes en âge d’activités nourrissent près de 96 personnes (de moins 15 ans et plus de 65 ans). Ceci est un fardeau social qui empêche les personnes travailleuses d’épargner. En termes d’investissements, cela signifie que les deux pays (mais de loin plus en RDC qu’au Kenya) devraient investir assez d’argent dans les services sociaux, dont l’un des plus importants secteurs est l’éducation.
Le même tableau indique que le domaine de l’enseignement supérieur et universitaire en RDC est de loin dominé par le secteur privé contrairement au Kenya. Selon wikipédia, le Kenya aurait un total de 43 universités parmi lesquelles plus de la moitié (soit 23) sont des universités publiques contre 20 universités privées.
La situation de la RDC est toute différente. Non seulement qu’il soit difficile d’obtenir les chiffres sur les universités opérant sur l’étendue du territoire national, il ressort clairement du tableau plus haut que les universités privées dominent le paysage RDCongolais avec plus de 50 universités contre seulement quatre universités publiques (Université de Kinshasa, Université de Kisangani, Université de Lubumbashi, Université Pédagogique Nationale).
La RDC, souvent présentée comme un scandale géologique dans de nombreux débats scientifiques et doctrinaires, navigue dans le ciel de la misère, avec une paupérisation visible et de plus en plus croissante alors que le pays a tout ce qu’il lui faut pour assurer un développement susceptible de traduire en faits concrets l’affirmation chère à Frantz Fanon « L’Afrique a la forme d’un revolver dont la gâchette se trouve au Congo »
Cette comparaison simpliste ne va pas jusqu’à s’intéresser aux infrastructures et au corps professoral. La plupart des universités opérant sur le sol RDCongolais manquent à la fois les infrastructures ainsi qu’un corps professoral qui leur soit propre. Elles doivent aller puiser dans le corps professoral vieillissant de l’Université-mère de Kinshasa qui abreuve toutes les universités du pays, tant publiques que privées.
En conclusion, il y a tout de même des pays africains comme le Kenya, en dépit des scandales de corruption qui rongent le pays, qui ont encore un sens et une fierté nationaux en investissant dans la jeunesse et le bien-être des populations. Par contre, la RDC, souvent présentée comme un scandale géologique dans de nombreux débats scientifiques et doctrinaires, navigue dans le ciel de la misère, avec une paupérisation visible et de plus en plus croissante alors que le pays a tout ce qu’il lui faut pour assurer un développement susceptible de traduire en faits concrets l’affirmation chère à Frantz Fanon « L’Afrique a la forme d’un revolver dont la gâchette se trouve au Congo » et traîner avec elle le développement de toute l’Afrique sur le plan énergétique, des infrastructures, et l’éducation : l’on se souviendra du temps où Camerounais et autres africains venaient massivement étudier à l’Université de Kinshasa. À quand l’accomplissement de ce rêve mobilisateur de Frantz Fanon ? Cette question, « Cent Tambours Mille Trompettes » la pose à ceux qui ont le destin de la RDC aujourd’hui et demain. Quel genre de leadership lèguent-t-ils au pays, à la jeunesse ? Jomo Kenyatta peut revenir aujourd’hui au Kenya, il aura des remords certes mais aussi de la joie. Mais si Joseph Kasa-Vubu, Mobutu Sese Seko, Laurent-Désiré Kabila revenaient aujourd’hui en RDC, seuls des remords et des douleurs les habiteraient. Mort dans l’âme… que les successeurs leur aient donné raison sur toute la ligne. Il n’est jamais tard pour bien ou mieux faire.